Pour les Journées du patrimoine, dans le cadre du projet
Plozarch (retour sur les enquêtes de Plozévet), un
week-end de projections et de conférences débats sur
"La mémoire filmée du monde paysan" est
organisé à Plozévet. Pourquoi ce mini-festival
de films sur le monde paysan à Plozévet ? Au
début des années soixante, parallèlement aux
grandes enquêtes sur Plozévet, Robert et Monique
Gessain (directrice de recherche émérite au CNRS),
anthropologues du Musée de l’Homme, ont planté
leur caméra dans cette commune du pays bigouden.
Sur les cinq films alors produits, l’un concerne Les
Agriculteurs, dont on suit les travaux encore peu touchés
par la mécanisation. Peu de temps plus tard, d’autres
recherches similaires, notamment en Aubrac et dans le
Châtillonnais près de Dijon, suivaient et filmaient de
la même façon un monde rural où
l’agriculteur allait bientôt remplacer le paysan,
où sa situation de producteur intégré au
marché agroalimentaire et au Marché commun
précipitait un nouvel exode rural. Ainsi, Jean-Dominique
Lajoux, un des fondateurs du CNRS Audiovisuel, a
réalisé une douzaine de films sur
l’Aubrac.
Les ethnologues n’étaient pas les seuls à
saisir ce moment de basculement et les problèmes qu’il
soulevait. Avec le développement du « cinéma
direct », des documentaristes se sont aussi
intéressés au milieu paysan. L’un des pionniers
en la matière, si l’on excepte Georges Rouquier et son
fameux Farrebique (1947), fut Mario Ruspoli, dont l’oeuvre,
malheureusement trop méconnue, est d’une importance
considérable pour l’histoire du documentaire moderne.
Ce mouvement va s’accroître au cours des
décennies suivantes, en abordant, d’ailleurs, des
thèmes plus divers. Mais, il sera toujours question des
problèmes suscités par le monde moderne, avec abandon
des campagnes et recul de la vie traditionnelle. C’est ce que
saisit, en 1975, la caméra de Claude Fléoutier et de
Patrick Camus dans Au pays breton ou la mémoire du sabot,
superbe film qui, évitant les stéréotypes,
témoigne du changement de mode de vie que connaissent alors
les campagnes bretonnes.
Cinquante ans plus tard, comment apprécier ces films ?
Quelles images ont-ils données du monde rural et paysan ?
Aujourd’hui, comment cette mémoire
s’intègre-t-elle dans le patrimoine culturel rural ?
Des questions qu’abordera Martine Cocaud, maître de
conférence en Histoire à Rennes 2, une
spécialiste de l’audiovisuel sur le monde rural. Que
sont devenus ceux qui furent alors filmés ? Que pensent-ils
des changements qu’ils ont vécus ? Comment les lieux
se sont-ils transformés ? Des interrogations qui motivent
Jean-Dominique Lajoux retrouvant des pellicules qu’il
n’avait pas encore montées. Et, qui ont
déclenché chez deux chercheurs du CNRS, Martin de la
Soudière et Jean-Christophe Monferran, l’ardent
désir de revenir dans la Lozère de Mario Ruspoli.