"Jean Céa était un grand professeur qui laisse une trace durable.
On se souviendra de lui comme un mathématicien et un bâtisseur brillant de niveau international, académicien européen, créateur après le départ à la retraite de J.A. Dieudonné du laboratoire et du département de Mathématiques de Nice où il venait d’être recruté comme professeur en 1970.
Jean a raconté avec brio dans son magnifique livre biographique comment, issu d’une famille très pauvre d’immigrés espagnols de la campagne algérienne, il avait su se hisser jusqu’à l’ENS. Initié à la recherche par J-L Lions dont il a été le premier élève, il était un spécialiste mondial de l’optimisation en Mathématique appliquée, un domaine où son livre était devenu une référence incontournable. Après un poste de professeur à Rennes où il a créé un premier centre de calcul, il a été recruté à Nice pour développer les Mathématiques appliquées et les liens avec l’informatique. Il a réussi pleinement ce défi, comme en témoigne les nombreux thésards qu’il a formés, et les collègues qu’il a su attirer à Nice, qui ont eux-mêmes formé de nombreux mathématiciens appliqués. Il est un des pionniers qui a permis la vitalité de ces disciplines qui enrichissent notre région.
Dès le début il a ancré le développement des Mathématiques appliquées à Nice en liaison avec le département d’informatique et avec l’Inria. Comme l’a rappelé Didier Auroux, il a eu l’idée géniale, la force, la persévérance et la capacité de bien s’entourer, pour créer des formations en ingénierie en sciences informatiques et mathématiques, à Sophia Antipolis, qui ont servi de fondations solides à l’ESSI, qui est devenue l’EPU, puis Polytech’Nice-Sophia.
On doit aussi à Jean Céa la création du remarquable CIMPA, Centre international de Mathématiques pures et appliquées, dont la direction est basée à Nice.
Après sa retraite, il y a trente ans, Jean a continué à oeuvrer infatigablement pour la communauté scientifique porté par son talent, sa curiosité et sa générosité.
Ces dernières années, comme en témoignent ses écrits, il se consacrait à la vulgarisation scientifique et la pédagogie de l’enseignement des mathématiques et plus particulièrement dans les quartiers défavorisés. Il a été un des premiers en France à diffuser les avantages de la célèbre méthode de Singapour.
Il payait aussi de sa personne en allant lui-même enseigner régulièrement des cours de rattrapage de mathématiques aux élèves défavorisés du quartier de l’Ariane (un faubourg de Nice), et à motiver leurs parents pour qu’ils soutiennent l’ambition scolaire de leurs enfants.
Jean était mon ami, je pleure le départ d’un scientifique remarquable d’une grande humanité."
André Galligo, professeur émérite au LJAD et ami de Jean