C’est un honneur pour l’Institut de Recherche sur le
Sud-Est Asiatique (IRSEA, UMR 6571) d’accueillir, à
Marseille, sur le Campus St. Charles de l’Université
de Provence, la 9e édition de la conférence
internationale des Burma Studies, la 3e après Göteborg
et Singapour à se produire hors des Etats-Unis, et la 1e en
France.
L’Ecole Française d’extrême Orient (EFEO),
le Centre Asie du Sud-Est (CASE-CNRS) et l’Institut National
des Langues et Civilisations Orientales (INaLCO) se sont
associés à l’IRSEA et au Center for Burma
Studies pour l’organisation et le montage financier. Mais
rien de tout cela n’aurait été possible sans la
qualité humaine et les compétences professionnelles
de Louise Pichard-Bertaux et de Véronique André pour
l’organisation générale, de Beth Bjorneby pour
le site web, de Mathilde Lefebvre pour
l’édition.
Avec plus de 150 participants attendus, cette conférence
témoigne tout autant du développement du Pôle
Asie sur Aix-Marseille que de l’extraordinaire dynamique des
études birmanes en France et dans le monde en regard des
difficultés auxquelles est confrontée la Birmanie
depuis plusieurs décennies. Nous sommes à la
fois heureux d’avoir pu inviter plusieurs collègues
originaires de Birmanie et déçus de n’avoir pu
apporter un soutien aussi large que nous l’aurions
souhaité.
A travers l’écrivain Daw Ju et ses œuvres,
c’est non seulement la place qu’occupe dans la
société birmane la littérature au sens large
– des œuvres littéraires aux traités
d’astrologie, des commentaires bouddhiques aux revues
généralistes disponibles à tout un chacun via
le réseau des bouquinistes de quartier – que nous
avons souhaité mettre en avant ; à travers cette
écrivain, c’est aussi la place de la femme birmane
à tous les niveaux de la vie politique et sociale de
Birmanie qu’un hommage appuyé est ici très
expressément rendu.
A travers les chercheurs, enseignants ou étudiants venus de
Birmanie, et à travers les Birmans issus de la diaspora,
c’est bien sûr vers l’ensemble des Birmans que
nous côtoyons tous depuis tant d’années que se
tourne notre pensée.
Plus de 150 participants et observateurs, spécialistes de la
Birmanie ou d’autres pays du sud-est asiatique sont
exceptionnellement réunis à Marseille.
Préhistoriens et archéologues, historiens,
sociologues, anthropologues, linguistes, architectes, ou encore
spécialistes des religions y côtoient les analystes en
sciences politiques et les acteurs de l’économie, du
développement et de l’humanitaire. Si les sujets
abordés n’ont parfois qu’un rapport lointain
avec la thématique sur laquelle nous avons voulu orienter
cette conférence, à savoir « la Birmanie
à l’ère de la globalisation », le
développement des outils méthodologiques,
l’accès à de nouveaux terrains ainsi que les
enjeux géostratégiques contribuent au glissement vers
le carrefour birman – où le local et le global sont
consubstantiels l’un de l’autre – pris pour objet
d’étude plutôt que la Birmanie et le confinement
de ses frontières.
Les quelques 21 panels témoignent de la diversité des
sujets développés, même si la place de certains
d’entre eux reste très marginale – c’est
le cas du faible nombre des interventions sur les
communautés musulmanes – voire inexistante comme pour
l’homosexualité et la transsexualité que nous
aurions pourtant voulu développer. Néanmoins ce
regard croisé porté sur les grands thèmes de
société passés et présents contribue
à affiner, voire à reformuler, la grille de lecture
de la société birmane. Aussi parcellaire soit-il, ce
regard croisé est tout autant un état de la recherche
qu’une ouverture vers des perspectives nouvelles.
Cette conférence est un espace de rencontre, de
réflexion et de création. Création
scientifique et création artistique
s’entremêlent. Plusieurs événements
culturels jalonnent les quatre jours de cette conférence.
Ils ont pour ambition de dresser une passerelle entre les
dimensions sociale, politique et scientifique dont les modes
d’expression artistiques constituent le prolongement.
Qu’il s’agisse des expositions de peintures
d’artistes Birmans nous invitant à porter « un
autre regard », de photos interprétées comme
« les battements d’ailes de papillons birmans »,
de vidéoprojections à travers l’œil de
photographes Birmans, ou encore de la représentation
théâtrale par des acteurs Birmans, ces espaces de
création sont fondamentalement birmans en ce qu’ils
sont conçus comme autant d’espaces de
liberté.
Les peintures et les photographies y côtoient les ouvrages
académiques, puisque plusieurs éditeurs et libraires
ont accepté de se joindre à nous. La production
française et occidentale y est présente, au contraire
de la production birmane, ou alors de façon très
marginale. Nous en sommes profondément
désolés. En revanche c’est par choix que nous
n’avons pas limité les livres présentés
à la seule Birmanie. Elle y a bien sûr toute sa place,
mais au sein de la production scientifique et littéraire
relative au sud-est asiatique dans son ensemble.
Conçue comme un carrefour conceptuel autant
qu’humain et artistique, une unité de lieu
s’imposait. C’est la raison pour laquelle les quatre
amphithéâtres et l’ensemble des salles
réservés pour l’occasion sont tous
situés au cœur du très beau campus Saint
Charles de l’Université de Provence à
Marseille, à deux pas de la gare et à quelques
minutes à pied du Vieux Port. C’est sur la maison
flottante – petit clin d’œil aux villages
lacustres d’Inlé – du Cercle Nautique de
Marseille, bien au-dessus de la ligne de flottaison pour mieux
profiter des bateaux accostés et sous la protection du Fort
St Jean, qu’un hommage sera rendu à nos
aînés au cours d’un dîner de
l’amitié.
Car l’exceptionnelle dynamique des études birmanes,
nous la devons sans aucun doute aux maîtres fondateurs. Un
hommage est rendu à trois d’entre eux : Denise Bernot
grâce à qui les études birmanes ont vu le jour
en France, et qui, du monumental Dictionnaire
birman-français au Rire de la terre, continue de nous
entraîner dans les différentes arcanes de la langue
birmane ; F.K. Lehman (kha) U Chit Hlaing dont The Structure of the
Chin Society suivi de l’œuvre que l’on sait a
contribué et contribue toujours au renouvellement des
études en anthropologie sociale ; Pierre Pichard dont
l’Inventaire des monuments de Pagan fut achevé avant
que la politique de « restauration » vienne brouiller
les pistes et le porte vers d’autres temples : de
Thaïlande, du Vietnam ou du Laos, du Bhoutan ou du sud de
l’Inde, mais qui tous, d’une manière ou
d’une autre, nous ramènent au carrefour birman.