Le présent ouvrage explore ce qui arrive aux sciences
humaines et sociales lorsqu’elles se déplacent ou se
«dépaysent» et analyse la façon dont
elles sont affectées et transformées en retour, aux
plans méthodologique, théorique et conceptuel, par
leur extension au-delà de l’aire géographique
de leur naissance. Concrètement, il se propose
d’examiner les mutations qu’elles subissent - ou dont
elles profitent - dans deux cas de figure distincts mais
également importants : lorsque des disciplines
formées au nord étendent leur validité
au-delà de leur aire géographique d’origine
pour s’appliquer à des terrains lointains et
«exotiques» ; et lorsque ces mêmes disciplines
sont enseignées, pratiquées, appropriées et
développées dans des aires géographiques
autres et des contextes historiques différents. Dans les
deux cas, la production «dépaysée» des
savoirs peut différer de la pratique «original
», «primitive» ou «domestique», dans
laquelle le chercheur et l’objet de sa recherche
appartiennent tous deux au contexte historique de formation des
sciences sociales.
Outre les contenus, il s’interroge aussi sur les pratiques et
ceux qui en sont les porteurs, chercheurs ou institutions qui
participent au transfert des savoirs ou contribuent à les
recombiner et les reformuler. Pour des raisons de compétence
et loin de tout présupposé essentialiste,
orientaliste ou culturaliste, l’analyse se borne aux savoirs
produits sur les pays arabes et la Turquie. Ne pouvant
prétendre à l’exhaustivité,
l’ouvrage privilégie les évolutions ayant
marqué les dernières décennies et, pour des
raisons tout aussi pratiques et pragmatiques, il
s’intéresse à quatre disciplines en particulier
: l’histoire, la sociologie, la science politique, et
l’économie.