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Conclusions de Gérard
Grunberg, président de section
Mes chers collégues,
En demandant á notre
directeur général, madame Bréchignac, de convoquer une
session pléniére du Comité national de la recherche
scientifique, la conférence des présidents du Comité
national se donnait trois objectifs. Le premier était de
rappeler á notre ministre lexistence de la
principale instance dévaluation scientifique
française et de sétonner, pour employer un
euphémisme, que cette instance nationale, composée de
900 chercheurs, denseignants chercheurs,
dingénieurs, de techniciens et
dadministratifs de la recherche, ne lui paraisse
pas devoir être consultée sur une éventuelle réforme
du CNRS. Le second objectif était de lancer par la
convocation de cette réunion pléniére un débat
national sur létat et lavenir de la
recherche en France, car il est clair á nos yeux
quune réforme du CNRS naurait de sens que
dans le cadre dune réflexion densemble sur
la recherche française qui devrait inclure les
différents acteurs de la recherche scientifique. Le
dernier objectif était de montrer que les membres de
notre communauté scientifique ne sont pas des
" révolutionnaires du statu quo "
contrairement á la caricature complaisamment
véhiculée, quils ont quelque chose á dire sur un
métier quils ont choisi et qu'ils sont ouverts á
l'esprit de réforme.
Madame Bréchignac a accepté, dans un esprit trés
positif, de convoquer cette réunion et nous len
remercions vivement. Cette journée, par votre présence
massive, par le nombre et l'importance des contributions
qui l'ont précédée, par la qualité des débats et
lintérêt des propositions faites a répondu á
nos attentes et a montré que notre communauté
scientifique était mobilisée et prête á prendre ses
responsabilités. Quelle se rendait compte que dans
la conjoncture présente, une absence de concertation et
des décisions hâtives risqueraient de mettre en péril
non pas seulement le CNRS, qui nest quun
outil, mais la recherche française elle-même qui est
ici notre préoccupation commune.
La discussion menée au
sein de notre communauté scientifique a dabord
fait ressortir nos désaccords avec la méthode adoptée
pour conduire la réforme et avec les présupposés qui
en ont guidé ladoption. Lexposé fait ce
matin par Vincent Courtillot, directeur de la recherche,
illustre cette situation :
- présenter comme un
constat ce qui nest quune série
dénoncés partiels et discutables,
- réaffirmer des
orientations en demandant de sy rallier á
lintérieur dun calendrier
préétabli,
- célébrer sa propre
action en se montrant sourd aux demandes de
débat et de concertation.
Autant déléments
dune démarche qui ne se caractérise ni par
louverture, ni par lesprit de dialogue, ni
même par la considération pour le métier de chercheur.
Permettez-moi á présent de revenir á ce qua
été la démarche de la Conférence des présidents du
Comité national depuis que le ministre a annoncé ses
projets.
Notre désaccord, disais-je est dabord un
désaccord de méthode. Ce désaccord porte dabord
sur labsence de concertation. Je ny reviens
pas. Le second désaccord concerne la question centrale
des rapports entre le CNRS et luniversité.
Laccord est général entre nous sur la nécessité
absolue de créer les conditions de la plus grande
proximité et complémentarité possibles entre eux.
Beaucoup a déjá été fait dans ce domaine. L'image
dun CNRS figé et trop peu impliqué dans les
structures et les activités universitaires ne correspond
pas á la réalité et ignore de surcroît la dynamique
á luvre au cours des années récentes qui
est une dynamique de rapprochement, institutionnalisée
par la politique de contractualisation. Faut-il une fois
encore rappeler que plus de 80% des unités du CNRS sont
associées á luniversité, que les unités propres
sont presque toutes liées par des conventions á
luniversité et participent pour la plupart aux
écoles doctorales, que les trois quarts des chercheurs
travaillent sur des sites universitaires, que la
majorité enseigne dans les établissements
denseignement supérieur et que les écoles
doctorales sappuient largement sur les unités
mixtes et associées, et en particulier sur les
chercheurs du CNRS ? Faut-il rappeler enfin que les
enseignants chercheurs sont plus nombreux dans ces
unités que les chercheurs du CNRS et quils sont
présents et actifs á tous les niveaux de
responsabilité du CNRS et du Comité national de la
recherche scientifique, qu'ils sont presque aussi
nombreux que les chercheurs dans les sections du Comité
national de la recherche scientifique et aux postes de
présidents de ces sections ?
Cette complémentarité croissante entre
luniversité et le CNRS doit-elle laisser la place
á une disparition du CNRS sous sa forme actuelle et á
sa transformation en une structure péri
universitaire ? Nous estimons quil
sagirait lá dune erreur fondamentale qui
ferait courir un risque majeur au dispositif général de
la recherche française. Les raisons historiques qui ont
conduit les pouvoirs publics á créer le CNRS pour faire
redémarrer et assurer la pérennité dune
recherche fondamentale de qualité en France nont
pas disparu. Bien au contraire, même si une part
importante de la recherche publique s'effectue en dehors
du CNRS. Il ressort des contributions á notre débat que
la situation de la recherche dans luniversité est
trés difficile. La massification de luniversité,
la diversité et la lourdeur des tâches que les
enseignants chercheurs ont á accomplir sans être
toujours secondés, réduisent fortement le temps
quils peuvent consacrer á leurs activités de
recherche. Les laboratoires du CNRS sont donc pour eux
des points dappui, des lieux d'échange et
d'émulation réciproques, par leur pérennité,
lexpérience et les méthodes accumulées, et
lexistence de chercheurs permanents. Le modéle des
universités américaines a dindéniables
qualités. Mais dans la situation française, il est tout
simplement inapplicable. Nos universités, pour la grande
majorité dentre elles nont ni
lindépendance, ni les traditions, ni les
ressources financiéres, ni les structures leur
permettant de mener á elles seules une véritable
politique de développement scientifique et cette
situation ne serait améliorée en rien par le simple
transfert de la substance du CNRS vers
luniversité. Pour nous, la solution réside dans
une complémentarité et une collaboration toujours plus
étroites entre les EPST et les universités.
La troisiéme erreur de
méthode est liée á une maniére de concevoir
laction réformatrice qui traduit les mauvais
côtés de lexception française : chambouler,
uniformiser et réglementer.
Nous ne partons pas de rien au CNRS. Nous avons depuis
une quinzaine dannées de nouveaux statuts qui
donnent de grandes possibilités qui ne sont pas encore
toutes exploitées. Le processus de contractualisation
avec luniversité est largement avancé. Les
concours de recrutement fournissent á la recherche des
personnels de grande qualité. Il sagit
daméliorer, dadapter, de perfectionner.
Plutôt que de changer les statuts, faisons ensemble un
bilan détaillé des acquis et des insuffisances et
voyons comment infléchir les comportements et les
pratiques dans le cadre des statuts actuels.
Il convient également d'éviter l'uniformisation. Et
dabord de véhiculer une image fausse dun
chercheur unidimensionnel. Le métier de chercheur a
beaucoup évolué au cours des derniéres années. Il
comprend de multiples facettes : recherche
fondamentale, recherche appliquée, enseignement,
valorisation, gestion et administration, recherche de
financements supplémentaires. Les différences de
tempérament, de goût, de discipline, de vitesse de
maturation personnelle tracent des parcours individuels
différents quil faut bien se garder de vouloir
uniformiser par des régles générales. La mobilité est
bonne á tout âge, lenseignement et la recherche
aussi. Cest cette diversité qui fait la richesse
de notre recherche et quil faut encourager par la
souplesse, non par luniformité. Beaucoup d'entre
nous considérent que notre statut est déjá trop
rigide. N'aggravons pas encore cette rigidité.
Enfin, une derniére
erreur de méthode consisterait á exporter un probléme
difficile á résoudre en en créant un nouveau sans pour
autant régler le premier. Il nest pas juste de
penser pouvoir contourner la question difficile de la
recherche á luniversité en se focalisant sur le
CNRS et en pensant que sa suppression, dans sa forme
actuelle, résoudrait á elle seule cette question. Qui
peut penser sérieusement quune remise en cause du
statut des chercheurs améliorerait réellement la
situation de la recherche á
luniversité ? Cette exportation du
probléme vers le CNRS, en se focalisant notamment sur la
question des statuts des personnels, ne servirait
quá transformer le mécontentement des enseignants
chercheurs en un ressentiment á légard des
chercheurs du CNRS. Le Comité national, est bien
décidé á refuser toute approche de la réforme de la
recherche qui aurait pour conséquence de créer des
divisions dommageables á l'intérieur de notre
communauté scientifique entre enseignants chercheurs et
chercheurs.
Je voudrais maintenant,
sans revenir en détail sur les propositions faites par
les rapporteurs des groupes de travail, aborder deux
grands thémes qui sont au cur des préoccupations
des membres du Comité national de la recherche
scientifique, et qui parcourent nombre des contributions
et interventions qui ont été faites á l'occasion de
cette journée, celui de l'évaluation et de la
prospective scientifiques d'une part et celui du métier
de chercheur d'autre part.
Il n'est pas nécessaire
d'insister sur l'importance des missions d'évaluation et
de prospective scientifiques. On sait que le Comité
national de la recherche scientifique joue dans ce
domaine un rôle central. Notre communauté scientifique
se montre trés attachée á lexistence et aux
missions actuelles du Comité national. D'abord parce
qu'il présente les trois caractéristiques
indispensables d'une véritable instance
d'évaluation : permanence, indépendance et
transparence. Ensuite parce qu'il est la seule instance
de cette importance qui fonctionne au niveau national et
qui rassemble chercheurs et enseignants chercheurs. Enfin
parce qu'il assure la médiation entre la direction du
CNRS et les chercheurs. Il est lémanation de la
communauté scientifique et á ce titre, il est
représentatif de cette communauté. Certes, la
pluralité des instances dévaluation est
souhaitable mais la place du Comité national, pour
l'ensemble de ces raisons, doit demeurer centrale dans le
dispositif français dévaluation de la recherche
scientifique. On sait quil nexiste pas
dinstance comparable pour lévaluation du
travail de recherche á luniversité. La question
est posée de savoir si il faudra en créer une ou si le
Comité national devra étendre sa mission
dévaluation á la recherche universitaire,
notamment dans les unités mixtes. Mais ce n'est pas á
notre instance de faire seule des propositions dans ce
domaine.
Le fait que les sections soient á la fois les instances
dévaluation et les jurys dadmissibilité est
également considéré comme trés utile, permettant
davoir une vue globale de la situation. De ce point
de vue, toutes les contributions ont insisté sur la
qualité des recrutements de chercheurs. En
labsence dun véritable marché des
universités comme il en existe aux Etats-Unis, une
instance nationale pour le recrutement des chercheurs qui
opére non seulement sur un marché national mais
international (recrutement de chercheurs de nationalité
étrangére, compétition de plus en plus courante avec
de grandes universités américaines et européennes pour
recruter les jeunes docteurs) a eu pour résultat
dassurer la bonne qualité des entrants. En
labsence de procédures comparables á
luniversité, ce systéme ne saurait être
supprimé ou même affaibli sans causer un grave dommage
á la recherche française.
Pour autant, les débats
ont fait ressortir que de nombreuses et réelles
améliorations devraient et pourraient être apportées.
Larticulation des différents niveaux
dévaluation nest pas excellente á
lintérieur même du Comité national : les
missions des Conseils de département et du Conseil
scientifique devraient être redéfinies et recentrées
sur les tâches de prospective et de politique
scientifique.
Si les évaluations par disciplines sont indispensables,
linterdisciplinarité pourrait être mieux assurée
par la création de sections transversales ou par
jumelage de certaines sections comme nous l'avons déjá
proposé.
Lapport dexperts internationaux devrait être
développé comme aide au Comité national.
Enfin, la place et le rôle des représentants des ITA au
sein du CN devraient être repensés. Des instances
d'évaluation particuliéres pour les ingénieurs du CNRS
pourraient être envisagées et la composition et le
fonctionnement des jurys pour le recrutement et les
promotions des ITA devraient être redéfinis.
Lévaluation des chercheurs a été considérée
comme satisfaisante, mais plusieurs contributions
expriment le souhait que les chercheurs dont
lactivité est insuffisante soient plus fortement
pénalisés. Une meilleure gestion des ressources
humaines devrait permettre aux chercheurs en difficulté
dêtre remis sur les rails ou encouragés á une
réorientation au lieu de les laisser senfoncer
sans quil soit possible de redresser la barre par
la suite.
Enfin, beaucoup réclament
une évaluation plus transparente et des contacts plus
directs et plus nombreux entre les sections du Comité
national et les chercheurs et les directeurs
dunité. Linformation nest pas toujours
suffisante et de maniére plus générale, il apparaît
que les liens ne sont pas assez forts entre les équipes
et les instances dévaluation et que les
responsables dunités ne sont pas assez perçus et
traités comme des acteurs essentiels de la politique de
recherche.
Jajouterai pour terminer sur ce point que beaucoup,
dans le bon fonctionnement du CNRS, dépend de la
qualité des relations entre le CN et la direction
générale et les directions scientifiques du CNRS. Sur
ce point, les progrés réalisés dans la période
récente nous paraissent significatifs et susceptibles de
permettre des améliorations sensibles dans l'évaluation
et la prospective, et plus généralement dans le
fonctionnement du CNRS.
Le métier de
chercheur
L'activité de recherche
posséde une forte spécificité. Dans tous les grands
pays, les pouvoirs publics, quelle que soit la diversité
des systémes, sont confrontés á la nécessité de
créer les conditions nécessaires pour que les membres
du monde académique qui ont le plus de goût et de
talent pour la recherche fondamentale, puissent exercer
leur activité de recherche dans la continuité. Chaque
systéme a ses avantages et ses inconvénients. En France
cette nécessité a conduit á la création des EPST et
á la reconnaissance du métier de chercheur et donc
d'une carriére de chercheur. L'avantage est que la
France, qui est un pays de taille moyenne, a pu
contribuer fortement á un développement somme toute
satisfaisant de la recherche fondamentale française.
Mais il faut veiller á deux choses : d'une part á ce
que le potentiel des chercheurs permanents soit utilisé
au mieux, soit dans le cadre de la recherche menée au
CNRS, soit dans des activités de recherche hors CNRS,
soit, hors du CNRS dans d'autres activités, notamment
l'enseignement. En même temps, il faut veiller á ce que
d'autres personnels, notamment les enseignants
chercheurs, aient véritablement les moyens et les
possibilités de faire de la recherche. La question de la
mobilité doit donc être abordée.
Cette question de la mobilité est évidemment
essentielle dans la carriére de chercheur comme dans
toute carriére et les différentes contributions au
débat montrent que notre communauté scientifique est
consciente á la fois de la nécessité de cette
mobilité et des obstacles rencontrés pour la mettre en
uvre. Il convient dabord de sentendre
sur la signification de ce terme. La mobilité pour la
mobilité na aucun sens et la mobilité
géographique nen est pas la seule modalité
possible.
Il existe plusieurs formes de mobilité, thématique,
géographique, professionnelle. Je n'entends pas ici les
détailler, mais plutôt insister, aprés les différents
intervenants, sur quelques points centraux de la
discussion.
D'abord sur la mobilité des chercheurs vers
l'enseignement par l'intégration temporaire ou
définitive dans les cadres de l'université.
Nous pensons que les chercheurs doivent être
encouragés, sils le désirent, á passer pour une
durée temporaire ou définitive dans luniversité.
Mais il ne suffit pas de constater
quaujourdhui ce passage se fait peu et mal
pour en déduire que les chercheurs ne sont pas prêts á
ce type de mobilité. Pour améliorer la situation
actuelle, il faut se livrer á une véritable remise á
plat des aspects liés á cette question, de pointer et
identifier les blocages et de tenter de les réduire.
Notamment en rendant plus attractive pour les chercheurs
la mobilité vers lenseignement supérieur du point
de vue des carriéres, de lenvironnement
scientifique et des moyens disponibles. Rien nest
pire que la situation actuelle qui consiste á laisser
sciemment se dégrader la carriére de chercheur, et
notamment les possibilités de promotion, en espérant
que les chercheurs découragés finiront par sen
aller vers l'université : miser sur la
démoralisation nest pas la meilleure maniére
dassurer á lenseignement supérieur
lapport temporaire ou définitif de bons
chercheurs. Il faut donc avoir le courage de traiter ce
probléme au fond. Sinon, les bons doctorants et post-doc
finiront par aller faire carriére ailleurs, dans
dautres pays ou dans dautres métiers plutôt
que de sengager en France dans le métier de
chercheur. Seule la mise en place de véritables
passerelles avec luniversité peut permettre de
favoriser la mobilité des chercheurs vers celle-ci.
Quant á la mobilité des enseignants chercheurs vers le
CNRS, elle a été accrue au cours de ces derniéres
années par laugmentation de loffre faite par
le CNRS de postes en accueil et en détachement. Les
chercheurs ne sen sont jamais plaints même si cela
a entraîné la diminution des postes de chercheurs CNRS.
Il faudrait sans doute aller plus loin et prévoir
notamment un passage réservé aux enseignants dans les
corps de chercheurs comme, symétriquement une voie
pourrait être réservée aux chercheurs du CNRS pour
rentrer dans les corps universitaires. Le CNRS ne
réglera pas á lui seul, cest évident, la
question de lexercice de la recherche par les
enseignants. Il faudra que les carriéres des
universitaires soient préalablement redéfinies pour
quune politique efficace de mobilité entre
lenseignement et la recherche puisse être menée.
Raison de plus pour que le débat sur la recherche soit
ouvert largement aux universitaires.
La mobilité des
chercheurs doit également être encouragée vers les
universités et centres de recherche étrangers,
notamment européens et américains. On sait que
l'insertion de notre communauté dans la communauté
scientifique internationale a beaucoup progressé dans la
période récente. Le CNRS devra s'attacher plus encore
á renforcer ses liens avec les centres étrangers afin
de mener une politique d'échanges de chercheurs. Enfin,
les chercheurs français doivent être mieux en mesure de
disposer, comme dans les autres grands pays développés,
outre de l'argent qu'ils tirent des contrats avec les
entreprises, de l'argent public pour participer aux
grands programmes de recherche internationaux.
Le dernier probléme que
j'aborderai est celui de la relation entre le CNRS et
l'entreprise, relation qui varie beaucoup d'une
discipline á l'autre. La mobilité des chercheurs CNRS
vers lindustrie est peu importante, c'est vrai.
Mais il est vrai aussi que traditionnellement les
entreprises françaises, contrairement á d'autre pays
développés, recrutent peu de docteurs ou de chercheurs.
Les entreprises préférent passer des contrats avec les
laboratoires du CNRS (il en existe 3000 actuellement). Il
serait faux de croire que les relations entre le CNRS et
les entreprises, surtout les plus grandes, sont peu
développées. Il conviendrait cependant de réexaminer
l'ensemble de ces relations et donc dassocier les
entreprises, comme partenaires du CNRS, au débat sur la
recherche que nous voulons poursuivre. Peut-être
faudrait-il aussi que les chercheurs soient moins
contraints par les réglements en vigueur qui régissent
leurs relations avec ces secteurs. Nous espérons que la
loi sur l'innovation nous aidera á améliorer ces
relations.
Mes chers collégues, ce
rapport ne se veut évidemment pas conclusif. Il n'aborde
que quelques uns des sujets abordés aujourd'hui et lance
quelques pistes. Nous avons pu mesurer la richesse de
cette premiére phase de discussion. Nous établirons des
actes de cette réunion qui n'aurait pas pu se dérouler
de façon satisfaisante sans le travail trés efficace de
notre secrétaire générale, Madame Schweighofer et de
toute son équipe et sans lhospitalité chaleureuse
de Pierre Potier. Cette réunion a montré que la
communauté scientifique n'était ni frileuse, ni
repliée sur elle-même, ni empêtrée par des réflexes
corporatistes mais au contraire ouverte au dialogue et
prête á prendre ses responsabilités dans un processus
de réflexion et de réforme de la recherche.
Nous demandons aux pouvoirs publics d'organiser un débat
national sur l'avenir de la recherche française qui
inclura l'ensemble des acteurs de la recherche, publique
et privée. Nous pensons en particulier que rien de
décisif ne sera fait sans une concertation véritable
entre l'université et le CNRS. Pour ce qui nous
concerne, la Conférence des présidents du Comité
national de la recherche scientifique est décidée á
poursuivre le débat et á prendre rapidement les
initiatives nécessaires.
Les chercheurs sont prêts á bouger et á s'ouvrir. Ils
le font déjá. Mais il faut se souvenir que le métier
qu'ils ont choisi est un métier fort particulier et que
son exercice nécessite un certain type de vocation, mot
que l'on hésite de nos jours á utiliser mais qui
correspond néanmoins á une certaine réalité. C'est
pourquoi je terminerai par ces mots du grand sociologue
allemand, Max Weber, qui écrivait en 1919 dans
Wissenschaft als Beruf : "tout être qui est
incapable de se mettre pour ainsi dire des illéres
et de se borner á lidée que le destin de son âme
dépend de la nécessité de faire telle conjecture, et
précisément celle-lá, á tel endroit dans tel
manuscrit, ferait mieux tout bonnement de sabstenir
du travail scientifique. Jamais il ne ressentira en
lui-même, ce que lon peut appeler
lexpérience vécue de la science. Sans cette
singuliére ivresse tu ne posséderas jamais la vocation
du savant et tu ferais mieux de tengager dans une
autre voie. Car rien na de valeur, pour
lhomme en tant quhomme, quil ne peut
faire avec passion" .
Je vous remercie.
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