Plan de transition du CNRS – la performance énergétique des bâtiments

Institutionnel

Suite à son bilan des émissions de gaz à effet de serre, le CNRS construit son plan de transition, autour de quatre premières thématiques : achats, numérique, mobilité et énergie. La performance énergétique des bâtiments est au cœur de la stratégie en matière d’énergie.

Salle blanche
Les salles blanches demandent un environnement contrôlé : des équipements souvent énergivores doivent réguler la température, la pression et le taux d'humidité, et limiter tout ce qui pourrait altérer les substances manipulées, comme la poussière. © Jean-Claude MOSCHETTI / IETR / CNRS Photothèque

Les enjeux : La stratégie nationale Bas carbone, comme la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Elan) et les décrets qui en découlent, donne des objectifs de réduction de consommation d’énergie finale ambitieux pour les bâtiments à usage tertiaire, dont font partie les sites de recherche : 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050. Face à la conjoncture actuelle, de nouveaux points d’étape viennent accélérer la stratégie : les consommations en énergie doivent être réduites de 10 % en 2024 par rapport à 2019, en réduisant aussi autant que possible la dépendance aux énergies fossiles. Mais pour optimiser ces consommations, il faut pouvoir les quantifier et surveiller de manière fine sur l’ensemble du territoire national. L’amélioration des performances demande une sensibilisation des personnels et des aménagements et rénovations d’ampleur variée, en tenant compte du cycle de vie des bâtiments et de l’évolution des besoins. La consommation énergétique du CNRS résulte aussi essentiellement de l’exploitation des équipements et installations scientifiques, qui nécessitent parfois des environnements contrôlés énergivores : des améliorations sur ces postes de consommation pourront-elles avoir un impact important ? quelles sont les marges de manœuvre sans affecter la qualité de la recherche menée dans ces bâtiments ?

928 000 m² de surface hors-œuvre nette dans les bâtiments gérés par le CNRS sur l’ensemble du territoire
298,9 GWh la consommation d'énergie du CNRS en 2019
8 pour 40 % Les 8 laboratoires et infrastructures de recherche les plus consommateurs représentent à eux seuls plus de 40 % de la consommation en électricité du CNRS

 Les pistes de solution : Afin d’améliorer la performance énergétique de ses bâtiments et de répondre aux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le CNRS s’est doté d’un plan de sobriété énergétique et participe avec succès aux appels à projets dédiés de l’État, dans le cadre des plans de relance et de sobriété décidés par le gouvernement. Il lancera aussi son propre appel à projets pour compléter les actions gouvernementales. Un plan de comptage permettra de suivre et d’optimiser l’usage de chaque bâtiment, au cas par cas, en fonction des contraintes de recherche. Le Plan pluriannuel d’investissement immobilier de l’organisme permet aussi des opérations d’investissement pour améliorer la performance environnementale et énergétique du parc immobilier. Le CNRS porte également des ambitions en matière de développement du recours aux énergies renouvelables, de récupération d’énergie fatale et de déploiement de solutions technologiques de pilotage des installations. Il s’appuie pour tout cela tant sur les équipes des services techniques en délégation régionale que sur le réseau de correspondants techniques Bâtiments (CTB) en laboratoires.

Jean Zay
La chaleur fatale produite par le supercalculateur Jean Zay, dont on voit ici le système de refroidissement, sera récupérée et alimentera le réseau d’échange de chaleur et de froid du Campus urbain Paris-Saclay. © Rafael MEDEIROS / IDRIS / CNRS Photothèque

Par exemple, au sein de la délégation régionale Occitanie Est, les CTB et le réseau des référents Développement durable et responsabilité sociétale (DDRS) ont recensé environ 80 actions à mettre en œuvre, plus ou moins aisées, rapides et efficaces, pour réduire la consommation énergétique des bâtiments. Par exemple, arrêter la production d’eau chaude des sanitaires, diffuser les bonnes pratiques du groupement de service EcoInfo sur l’usage des équipements informatiques, prévoir les possibilités de mutualisation d’équipements scientifiques qui consomment beaucoup comme les congélateurs, réfrigérateurs ou autoclaves1  indispensables aux expériences scientifiques, ou encore équiper les bâtiments de sondes pour mesurer plus finement les températures. Dans certains laboratoires, des études sont en cours pour évaluer la faisabilité et/ou les effets de ces différentes actions, telles que la possibilité de réduire la température des congélateurs de -80 °C à -70 °C sans impact sur la recherche scientifique.

  • 1Un autoclave est un récipient hermétique conçu pour dépasser la pression atmosphérique.

« Un suivi fin facilite l’adaptation de la consommation aux besoins »

Grégory Benetello Yvars est responsable du Pôle Maintenance/Exploitation au sein du Service technique et logistique de la délégation régionale Occitanie Est, l’une des 18 délégations régionales du CNRS.

Quel est le rôle du Pôle Maintenance/Exploitation de votre délégation ?
Grégory Benetello Yvars : L’idée est d’harmoniser les services techniques des bâtiments gérés par le CNRS sur le territoire de la délégation. Pour cela, mon équipe et moi-même travaillons au plus près des sept correspondants techniques de ces bâtiments (CTB) répartis sur les campus, avec un rôle d’expertise et de conseil sur l’entretien et l’utilisation optimale de leurs installations. Bien entretenir les bâtiments est capital pour optimiser la performance énergétique. Cela demande de vérifier très régulièrement l’état du parc : ce travail étant en pratique souvent fait par des prestataires, nous encadrons leurs actions au plus près et nous nous appuyons sur leurs rapports pour recommander un entretien plus poussé sur certaines parties du bâtiment ou préconiser un remplacement de certaines pièces, etc. Mutualiser les marchés en passant par la délégation permet d’harmoniser les prestations dans tous les bâtiments et de faciliter le suivi global.

J’anime aussi, à l’échelle de la circonscription, le réseau des CTB, qui est national. Ce réseau permet de partager les difficultés rencontrées et les solutions développées par chaque délégation. Avec leur expérience, les CTB ont souvent une façon innovante et adaptée d’envisager leurs bâtiments et proposent des manières d’agir innovantes, dont les autres délégations peuvent s’inspirer. C’est très enrichissant !

Nombreux panneaux solaires sur un toit
La délégation régionale Occitanie Est explore diverses pistes de rénovation thermique, de production d’énergie renouvelables et/ou d’optimisation énergétique, comme ici l'installation de panneaux photovoltaïques sur certains bâtiments. © CNRS - Délégation Occitanie Est

Les préoccupations environnementales sont de plus en plus fortes au sein des laboratoires. Cela change-t-il votre manière de travailler ?
G. B. Y. : Oui, notre travail gagne en visibilité et les idées des CTB reçoivent plus d’écho dans les laboratoires, jusqu’aux directions qui sont plus sensibles à ces questions. Les budgets sont aussi plus faciles à trouver pour faire évoluer les installations qu’il y a quelques années. En effet, nous préconisons parfois de modifier entièrement le système d’énergie d’un bâtiment. Depuis mars 2022 et la guerre en Ukraine, nous nous efforçons de remplacer les chaudières au fioul et gaz par des pompes à chaleur, dont le rendement est théoriquement trois fois supérieur, ou par la filière bois écologique. Grâce au plan France Relance, des panneaux photovoltaïques ont aussi été installés sur deux structures, des études d’opportunité étant en cours pour d’autres installations : ces dernières années, ces panneaux sont devenus moins coûteux et plus performants, le retour sur investissement devenant donc plus rapide. Il y a aussi des progrès du côté des systèmes de gestion informatisée qui permettent par exemple d’ajuster la température des pièces en pilotant le chauffage et la climatisation de manière fine et intelligente. Aujourd’hui, presque tous les appareils sont devenus pilotables avec une simple connexion Wifi : les systèmes sont donc aussi moins coûteux et plus faciles à déployer à grande échelle.

Avant de pouvoir agir, il faut évaluer la performance énergétique des bâtiments. Comment procédez-vous ?
G. B. Y. : C’est le rôle du plan de comptage et pilotage de la performance énergétique du CNRS. Nous essayons d’améliorer le système de comptage des fluides (électricité, gaz, eau) et, grâce à ces relevés heure par heure, il est possible d’avoir une analyse plus profonde de la consommation énergétique, bâtiment par bâtiment, sur l’ensemble de la délégation. Cela permettra de mieux analyser ce qui consomme et pourquoi, et comment agir : quelle amélioration de la consommation apporte telle ou telle action ? quels sont les équipements énergivores sur lesquels il faut travailler en priorité ? quelle est la marge de manœuvre en toute sécurité, en particulier s’il s’agit d’équipements scientifiques utilisés dans des expériences complexes ou de salles blanches ? Certains sites bénéficient déjà d’un suivi fin, comme le pôle Chimie Balard Recherche, ce qui peut faciliter l’adaptation de la consommation aux besoins. Sur certains bâtiments plus anciens, le comptage lui-même est difficile et des projets sont en cours pour les équiper de compteurs et de supervision. Il est indispensable de développer des diagnostics précis pour cibler les améliorations des bâtiments et ainsi préserver notre environnement.