Électronique et télécommunications de demain : deux communautés main dans la main

Institutionnel

Au mois de mars, les PEPR Électronique et Réseaux du futur se sont réunis pour partager une semaine scientifique. Un évènement qui a permis de renforcer les liens entre des équipes de recherche, mais aussi avec les industriels.

De plus en plus présents au sein de la recherche publique française, les Programmes et équipements prioritaires de recherche (PEPR) structurent des équipes scientifiques sur des thématiques choisies. Ils sont financés à hauteur de trois milliards d’euros dans le cadre du programme France 2030, et sont répartis entre vingt-six PEPR des stratégies nationales et vingt-deux PEPR exploratoires. Ces PEPR disposent ainsi de moyens importants pour donner un coup d’élan aux recherches dans des domaines thématiques distincts, ce qui ne les empêche pas de coopérer entre eux.

Les PEPR Électronique, dédié à l’innovation, à la croissance et à la relocalisation de la production de composants électroniques de pointe, et Réseaux du futur, consacré de son côté aux dernières et aux prochaines avancées des télécommunications, se sont ainsi retrouvés pour une semaine scientifique, qui s’est tenue du 18 au 22 mars sur le campus grenoblois de Minatec1 . Ces journées, organisées par le CNRS, le CEA et l’Institut Mines-Télécom (IMT), étaient structurées en trois temps : les deux premiers jours ont été consacrés au PEPR Électronique, les deux derniers aux Réseaux du futur, tandis que le 20 mars a servi de journée commune. Ces collaborations, fortement encouragées par le CNRS, aident à comprendre comment chaque communauté peut en nourrir d’autres, par exemple en développant des technologies et composants pour des applications de connectivité.

PEPR
Les PEPR Électronique, dédié à l’innovation, à la croissance et à la relocalisation de la production de composants électroniques de pointe, et Réseaux du futur, consacré aux dernières et prochaines avancées des télécommunications, se sont retrouvés pour une semaine scientifique du 18 au 22 mars sur le campus grenoblois de Minatec. © CNRS

Développer une recherche d’excellence et transférer des résultats

« Parmi les retours que j’ai eus sur cette semaine, je retiens qu’elle a montré la cohérence de la structuration de nos deux PEPR, autour de projets ciblés et d’actions transverses », se réjouit Isabelle Sagnes, directrice de recherche au Centre de nanosciences et de nanotechnologies2  et directrice pour le CNRS du PEPR Électronique. Co-piloté par le CNRS et le CEA, le PEPR Électronique est coordonné côté CEA par le directeur scientifique du CEA-Leti, Thomas Ernst.

Le PEPR Réseaux du futur est quant à lui co-piloté par Serge Verdeyme, délégué scientifique à l’Institut CNRS Ingénierie, Daniel Kofman de l’IMT et Dimitri Kténas du CEA. Il s’occupe du futur des télécommunications, 5G et 6G en particulier.

« La stratégie nationale couvre quatre axes, précise Serge Verdeyme. Développer les usages, l’offre de technologies, la formation et la R&D. Nous avons ainsi reçu 54 millions d’euros pour développer la recherche académique de l’axe R&D. Dans un objectif de soutien à la souveraineté nationale, les PEPR ont pour principaux enjeux de développer une recherche d’excellence et de transférer ses résultats, de former à et par la recherche en finançant des doctorats et postdoctorats et de structurer les communautés. »

PEPR Électronique, un budget de 86 millions d’euros

« Le PEPR Électronique est au cœur de la stratégie électronique nationale de France 2030, lancée en 2021 par le Président de la République, embraye Isabelle Sagnes. Le programme, constitué en deux volets, a été doté à hauteur de 86 millions d’euros pour construire et préparer les briques de base et les composantes de technologies stratégiques. La première partie vise à renforcer le réseau national de salles blanches académiques en équipements de micro et nanofabrication, via le réseau RENATECH piloté par le CNRS et la plateforme de nanocaractérisation (PFNC) du CEA. Le second volet concerne des avancées scientifiques réparties en quatre grandes thématiques. »

Il s’agit de la mise en place de filières technologiques pour l’obtention de composants pour la perception numérique, principalement autour de nouveaux capteurs, ainsi que pour l’électronique pour la conversion, notamment sous forme de transistors et de convertisseurs de puissance ou de lumière, pour les télécommunications et pour l’électronique pour le calcul. Les résultats du tout dernier appel à projets du PEPR Électronique, lancé en juin 2023, viennent tout juste d’être dévoilés.

Montée en fréquence, edge IA et objets connectés

Les recherches du PEPR Réseaux du futur ont quant à elles démarrées en 2023. « Nous avons, en quelque sorte, une génération de doctorants de décalage avec le PEPR électronique», explique Serge Verdeyme. Mais pas de quoi gêner le rapprochement entre les deux structures. Leur journée commune a mis en valeur les points communs entre les deux PEPR selon trois axes principaux : la montée en fréquence, l’edge IA et les objets connectés.

La montée en fréquence concerne des technologies émergentes, comme les ondes térahertz, qui demandent des composants capables de traiter des signaux aux fréquences extrêmement élevées. L’edge IA désigne les systèmes d’intelligence artificielle qui ne sont plus cantonnés à de grands centres de calcul, et qui fonctionnent à l’inverse de manière décentralisée, au plus près de l’utilisateur. Les objets connectés sont tout naturellement les produits qui bénéficieront le plus de ces avancées technologiques.

Des enjeux de souveraineté nationale

« Notre recherche porte sur des aspects fondamentaux et reste à un niveau de maturité technologique relativement limité, insiste Serge Verdeyme. Nous travaillons cependant en lien étroit avec les équipementiers et opérateurs, et nos résultats ont vocation à être transférés à l’issue de notre programme. » « Nous regroupons des compétences scientifiques dispersées afin de pouvoir créer plus tard des filières à fort niveau de maturité technologique (TRL), abonde Isabelle Sagnes. La communauté électronique apprécie fortement cette approche liée à des enjeux de souveraineté nationale. »

Avec 565 inscrits, cette rencontre a été un grand succès. Si le public était surtout composé de chercheurs et d’enseignants-chercheurs, une trentaine de représentants d’entreprises étaient également présents. Il est en effet crucial de communiquer les avancées des PEPR aux industriels des secteurs concernés. Les PEPR soutiennent le développement économique et comptent valoriser leurs travaux de recherche par des transferts industriels.

Valorisation et transferts industriels

« Cette collaboration est particulièrement importante dans les télécoms, car elles reposent sur des standards mondiaux décidés par des instances internationales, explique Serge Verdeyme. La présence de grands acteurs industriels est donc cruciale pour se préparer aux futurs standards de la 6G, qui seront définis dans trois à quatre ans. »

Le PEPR Électronique a mis en avant de nombreuses avancées. On y retrouve des matériaux 2D de grande surface, des capteurs en carbure de silicium et en diamant, des transistors en nitrure de gallium et en phosphure d’indium, des oscillateurs optomécaniques micro-ondes sur silicium, des transmissions en térabits par seconde pour des signaux térahertz, ou encore la conception de circuits stochastiques ou encore la cointégration de synapses artificielles. De quoi alimenter en composants extrêmement performants les technologies d’aujourd’hui et de demain.

Les projets en cours ont été présentés du côté des réseaux du futur, notamment sur des technologies plus écoresponsables. Il s’agit surtout de concevoir des systèmes qui s’adaptent de manière dynamique, en temps réel, aux besoins des usagers pour des réseaux plus efficaces, mais aussi pour pouvoir répondre à des besoins occasionnels comme de grands évènements planétaires ou des catastrophes naturelles.

Cette semaine scientifique et cette journée commune ont ainsi dépassé leurs objectifs, tout en prouvant que la structuration de la recherche selon une stratégie d’accélération bien précise ne ferme nullement la porte aux collaborations.

  • 1Campus d’innovation en micro-nanotechnologies
  • 2C2N, CNRS/Univ. Paris-Saclay