Une Année de la Physique réussie
Le 16 juin 2023, Pap Ndiaye, ministre de l’Éducation Nationale, et Antoine Petit, président-directeur général du CNRS, signaient une convention pour l’Année de la physique, un programme national destiné à rapprocher le monde de la recherche des enseignants et de leurs élèves, pour renforcer l’orientation vers les carrières scientifiques. Bilan.
Dans un contexte où l’orientation des jeunes vers les métiers scientifiques reste insuffisante, l'Année de la Physique1 a permis d’ouvrir des perspectives. Alors que les élèves commencent à réfléchir à leur avenir dès le collège, beaucoup se sentent perdus face aux multiples possibilités de parcours. Cette année thématique a démontré la grande diversité des sujets auxquels la physique s’intéresse et les métiers variés liés à cette discipline. « Il manque environ 15 000 ingénieurs et ingénieures formés par an en France, rappelle Séverine Martrenchard, déléguée scientifique à CNRS Physique et coordinatrice de l’Année de la Physique au CNRS. Il est donc urgent d’encourager les élèves, et notamment les filles, à se tourner vers ces métiers porteurs d’avenir. »
La physique au-delà des manuels
L'idée est donc là : guider et inspirer la prochaine génération de scientifiques. C'est une initiative qui s'adresse à tous, et en particulier aux lycéens et aux enseignants, pour rendre la science accessible. Et ce qui distingue cette année thématique, c’est son approche immersive, car il ne s'agit pas seulement d'apprendre à calculer des trajectoires pour devenir ingénieur et ingénieure en aérospatial. Ces immersions ont permis d’ouvrir l’esprit des élèves sur autre chose que les équations et les formules de physique et ainsi de les initier à de la physique authentique et expérimentale, celle de la recherche, par exemple lors d’un travail sur de vrais projets de recherche, avec des physiciens du CNRS en astrophysique ou dans le cadre d’expériences sur la matière.
Cette année thématique n’a pas seulement concerné les grandes métropoles. Le CNRS a mobilisé les quatre instituts concernés par la physique - 1/3 de la recherche au sein de l’organisme - les services communication de ses délégations régionales et 145 de ses laboratoires pour 366 actions déployées sur tout le territoire. Grâce à un effort coordonné entre le CNRS et les académies, des actions ont été déployées dans les établissements de toute la France, y compris dans des zones défavorisées ou rurales. « Nous avons concentré nos efforts pour atteindre les élèves des banlieues, des zones rurales et en outremer, où l’accès à la recherche scientifique est souvent plus limité », ajoute Cécile Bruyère, Inspectrice générale de l’éducation, du sport et de la recherche et coordinatrice du projet au Ministère de l’Éducation nationale. Le programme La Physique Étonnante pour un Grand Oral Percutant a été un bel exemple de cet engagement, donnant à des élèves de la voie générale spécialité physique-chimie, et de la voie technologique spécialité sciences physiques et chimiques en laboratoire (SPCL)@ d’une centaine de lycées, l’opportunité de travailler sur des sujets de recherche contemporains, racontés dans les livres Etonnante physique et Etonnants infinis, tout en préparant leur Grand oral du baccalauréat. « Ce projet a permis de casser les barrières entre le monde de la recherche et les élèves en accueillant des physiciennes et physiciens du CNRS directement dans leurs classes », ajoute Séverine Martrenchard.
1050 enseignants formés
L'Année de la Physique a également permis de renforcer les compétences des enseignants, véritables relais de cette dynamique. 33 formations ont été organisées par les Délégations régionales du CNRS pour 1050 enseignants dans 20 académies à travers la France, avec l’objectif de leur donner les outils pour rendre authentique et robuste la contextualisation de leurs cours et éveiller l'intérêt de leurs élèves pour la physique et ses métiers. Ces formations, alliant conférences et visites de laboratoires, ont mis l’accent sur la démarche scientifique et le lien entre la recherche et l’enseignement. Comme le soulignait un enseignant ayant participé : « Les visites de laboratoires ont été très enrichissantes, j’ai désormais de quoi montrer à mes élèves comment la physique se vit au quotidien, et comment elle ouvre la voie à des carrières passionnantes. » Des formations non pas uniquement destinées à améliorer l’enseignement de la physique, mais aussi à fournir aux enseignants les clés pour accompagner leurs élèves dans leurs choix d’orientation.
Promouvoir la place des femmes dans les sciences
Anne L’Huillier, lauréate du Prix Nobel de physique 2023, est devenue un symbole fort : première française à recevoir ce prix depuis Marie Curie il y a 120 ans, elle incarne un modèle pour les jeunes filles hésitant à s’orienter vers des carrières scientifiques. « Il est essentiel de montrer que les femmes ont leur place dans les laboratoires et qu’elles peuvent réussir, pour que les filles ne se censurent pas elles-mêmes », souligneThierry Dauxois, Directeur de CNRS Physique, Président du Comité de Pilotage de l’Année de la physique. Des actions concrètes ont été menées pour encourager cette dynamique, avec des projets comme la bande dessinée « Ébullitions », réalisée en partenariat avec des physiciens et physiciennes du CNRS. Cette dernière met en lumière 12 parcours, avec pour ambition de montrer la diversité des métiers et des trajectoires possibles dans le domaine de la physique. Cette BD a été largement diffusée dans les lycées avec plus 4 300 exemplaires distribués permettant aux jeunes de découvrir des parcours de chercheurs, d’ingénieurs, de techniciens, femmes et hommes, à différentes étapes de leur carrière, et d’imaginer leur propre avenir scientifique.
Un impact tangible et durable pour des milliers d’élèves
Les résultats sont là. L'Année de la Physique a permis de toucher des milliers d’élèves, souvent issus de milieux moins exposés à la recherche. Pour eux, visiter un laboratoire ou échanger avec des physiciennes et des physiciens a été un moment marquant, qui a parfois bouleversé leurs perspectives. Pour d’autres, cette rencontre a permis de découvrir la diversité des carrières scientifiques, allant de la recherche fondamentale aux applications les plus concrètes dans des secteurs comme le numérique, l’énergie ou la santé. « En donnant aux élèves les moyens de comprendre comment la science fonctionne et quels sont les métiers qui en découlent, l’Année de la Physique a fait bien plus que sensibiliser. Elle a contribué à former des citoyens mieux informés, capables de se projeter dans des carrières scientifiques, et a montré que la physique n'est pas réservée à une élite, mais accessible à tous », rapporte Cécile Bruyère.
Alors que l’Année de la Physique touche à sa fin, l’enjeu est désormais de ne pas laisser retomber cet élan. De nombreux projets initiés, comme les visites de laboratoires, ont vocation à se poursuivre et à s’étendre. Les résultats obtenus en termes de participation et de retour d’expérience plaident en faveur d’une pérennisation de ce type d’actions. Le site web dédié à l’Année de la Physique a recensé plus de 300 projets portés par des laboratoires du CNRS et de nombreuses ressources ont été développées pendant cette année pour tous ceux qui souhaitent découvrir ou approfondir leurs connaissances en physique. Mais surtout, la Chimie s’associera à la Physique pour réitérer l’expérience du Grand oral auprès des lycéens pendant l’année scolaire 2024-2025.
- 1 MENJ/CNRS/CEA/France Université/Société Française de physique, rejoints par d’autres acteurs du monde de la recherche et du monde de l’éducation.