iWaves Lab : laboratoire commun d’innovation en circuits intégrés RF
Le laboratoire IMS et l’entreprise NXP ont dernièrement donné le coup d’envoi de leur laboratoire commun : iWaves Lab. Le prolongement d’une collaboration fructueuse, depuis près de dix ans, autour de puces radiofréquences (RF) innovantes, à destination de l’automobile, de l’industrie, ou encore des télécoms.
NXP est l’un des leaders mondiaux de la fabrication de puces à base de semi-conducteurs, à destination de l’industrie, des réseaux télécoms, de l’IoT et, particulièrement, du secteur automobile. « Une voiture embarque une quantité considérable de microcontrôleurs, de microprocesseurs, de capteurs, etc., qui permettent de remplir de multiples fonctionnalités : multimédia, radar, assistance à la conduite… », observe Fabien Brunelli, design manager en circuits intégrés RF chez NXP. « Et ce nombre ne fait qu’augmenter avec l’essor des voitures électriques et l’arrivée des véhicules autonomes. Au sein de NXP, nous produisons les puces sur lesquelles reposent ces composants essentiels. »
Un laboratoire commun pour renforcer la collaboration
Sur ce marché très concurrentiel, NXP doit sans cesse innover et développer de nouvelles briques technologiques. C’est pourquoi l’entreprise collabore, depuis 2016, avec le laboratoire Intégration du matériau au système (IMS, CNRS/Université de Bordeaux/Bordeaux INP). « Nous sommes toujours en quête de nouvelles architectures de circuits intégrés dans des domaines de haute fréquence », indique Fabien Brunelli. « Mais à de telles fréquences – en l’occurrence autour de 80 à 140 GHz – peuvent apparaître des parasites ayant un impact critique sur les performances du système. Ce travail nécessite donc un savoir-faire particulier, dont l’IMS fait preuve, en plus de sa capacité d’innovation. »
Cette collaboration ayant porté ses fruits, les deux entités ont décidé de la renforcer et de la structurer, à travers la création du laboratoire commun iWaves Lab, officiellement inauguré le 27 février 2025, pour une durée de cinq ans. « Jusqu’alors, chaque projet de recherche conjoint se déroulait selon ses propres conditions, avec son financement spécifique », relate Thierry Taris, professeur des universités à Bordeaux INP, au sein de l’IMS, et responsable académique d’iWaves Lab – Fabien Brunelli en étant le responsable industriel. « Il nous a alors semblé pertinent d’uniformiser ces initiatives et de nous inscrire sur le long terme, avec une vision commune sous la forme d’une feuille de route scientifique, constituée ici de quatre thématiques majeures de recherche. »

Explorer le potentiel et les défis des très hautes fréquences
En premier lieu, l’équipe d’iWaves Lab vise à améliorer les radars automobiles, afin de renforcer la sécurité et l’autonomie des voitures. En effet, si cette technologie est utilisée depuis de nombreuses années, elle reste sujette à de nombreux défis. « Par exemple, le pare-chocs constitue un facteur limitant significatif dans la sensibilité et la performance du radar », mentionne Thierry Taris. « Ce module se situant derrière le pare-chocs, il reçoit d’abord un signal très élevé en retour de ce dernier. Et cette information inutile – puisqu’on ne cherche pas à savoir où se situe le pare-chocs – peut brouiller d’autres signaux plus intéressants, comme la présence d’un vélo à dix mètres. » L’IMS et NXP ont ainsi déjà mené des travaux de recherche sur ce sujet (deux thèses étant en cours), en explorant des architectures de circuits intégrés fonctionnant à des fréquences beaucoup plus élevées, ce qui a abouti au dépôt de plusieurs brevets et à une première mondiale dans le domaine.
Ce fonctionnement à haute fréquence est également employé pour la deuxième thématique d’iWaves Lab, qui cible particulièrement l’industrie. « Un bras robotique pouvant avoir besoin de tourner dans tous les sens, ses mouvements ne doivent pas être gênés par des câbles », expose Thierry Taris. « Dès lors, comment transmettre et recevoir des données sans fil, à des débits très élevés et ainsi permettre des rotations libres et rapides? » Afin de développer des puces capables de répondre à ce besoin, l’équipe du laboratoire commun se tourne vers l’exploitation de larges bandes de fréquences dans le domaine millimétrique. L’objectif : atteindre des débits aussi élevés qu’avec des connexions filaires, en relevant les défis associés à ces niveaux de fréquence.
Compatibilité électromagnétique et stations de base 5G et 6G
Par ailleurs, iWaves Lab aborde la question de la compatibilité électromagnétique des circuits intégrés, en particulier dans le secteur automobile. « Lorsque deux blocs de puces sont à proximité l’un de l’autre, il faut respecter des seuils de rayonnement électromagnétique, définis par des normes », explique Fabien Brunelli. « Notre but est de mettre au point des puces émettant à de hautes fréquences, tout en limitant leur rayonnement. » À cet effet, plusieurs techniques sont possibles, à commencer par le blindage, qui consiste à ajouter une couche de métal afin d’éliminer une partie du rayonnement. Une approche efficace, qui s’accompagne toutefois d’un poids et d’un coût supplémentaires, ce qui constitue une contrainte pour un constructeur automobile. Des techniques de traitement du signal peuvent alors intervenir en complément, de sorte à réduire le rayonnement sans recourir à une méthode physique.
Enfin, le dernier axe de recherche s’intéresse à des problématiques autour de la 5G et de la 6G. « Un des gros défis de la 5G et de la 6G, pour les équipementiers télécoms, consiste à fournir des équipements réseaux émettant sur de larges bandes », note Thierry Taris. « Contrairement aux précédentes normes, elles agrègent en effet plusieurs standards, ce qui impose aux équipements de fonctionner sur toutes les bandes associées en même temps. Nous travaillons donc au développement d’amplificateurs de puissance, utilisés par les stations de base pour émettre leurs ondes radio, répondant à ces exigences. »
Au total, six thèses CIFRE sont en cours sur ces différents sujets et de nouvelles seront régulièrement lancées tout au long du laboratoire commun. Au-delà des résultats espérés, qui pourraient être exploités – ou non – par l’entreprise, le but est aussi de former et d’accompagner de jeunes chercheurs. « Ce qui est également remarquable dans notre collaboration, c’est que depuis le début, chaque doctorant a reçu une proposition d’embauche de la part de NXP », souligne Thierry Taris. « Cela traduit une forme d’engagement moral : il ne s’agit pas uniquement de profiter des compétences d’un chercheur, mais aussi de nouer une relation sur le long terme, enrichissant continuellement le lien de confiance entre NXP et l’IMS. Un modèle vertueux au sein duquel chaque partie s’investit pleinement et s’en trouve récompensée. »