Le CNRS coordonne l’agence de programmes « Climat, biodiversité, sociétés durables »

Innovation

En décembre 2023, le Président de la République française annonçait le lancement de sept agences de programmes, dont l’une – « Climat, biodiversité, sociétés durables » –  est confiée au CNRS. Elsa Cortijo, sa nouvelle directrice exécutive, en explique les ambitions et l’esprit.

Quelles sont les missions de l’agence de programmes « Climat, biodiversité, sociétés durables » ?

Elsa Cortijo1 : Les sept agences2 ont pour vocation de mieux coordonner les actions des acteurs de la recherche et d’optimiser l’organisation globale de l’écosystème de recherche et d’innovation, notamment pour le rendre plus à même de répondre aux grands enjeux auxquels les sociétés doivent faire face.

Leurs missions reprennent en les élargissant celles des anciennes alliances thématiques de recherche3 , notamment, pour Climat, biodiversité, sociétés durables, l’Alliance pour l’environnement (AllEnvi). Les fondamentaux de cette agence consisteront donc à structurer et animer des communautés, organiser la veille et une prospective dynamique autour de quelques grands enjeux sociaux, analyser des équipements et infrastructures de recherche ou technologiques indispensables à la communauté scientifique, cartographier la présence française actuelle dans les grands programmes européens et enfin piloter et coordonner des programmes nationaux de recherche, dont les programmes et équipements prioritaires de recherche.

De plus, chaque agence devra orchestrer le pilotage national de programmes de recherche, jugés stratégiques car à fort impact sociétal et, souvent, relevant d’un intérêt souverain. Elle sera également à même de répondre aux sollicitations de l’État autant que de besoin.

J’envisage en outre une autre mission pour l’agence « Climat, biodiversité, sociétés durables » : entendre, à travers celle-ci, les enjeux des acteurs de la société civile et en inspirer des projets de recherche susceptibles d’intéresser plusieurs partenaires. Je souhaite ainsi positionner l’agence comme un lieu où faire dialoguer société civile et recherche, recherche et société civile. La recherche conduit ses propres projets selon les critères et modalités de la démarche scientifique et transmet les connaissances acquises à la société civile ; elle disposera aussi d’un espace où entendre les préoccupations de cette dernière et s’en saisir sous forme de nouveaux enjeux de recherche.

Quels seront vos premiers projets à la tête de l’agence ?

EC : D’ici la fin de l’année, nous devrons construire la gouvernance de l’agence. Celle-ci devrait se décliner selon trois niveaux. En premier lieu, avec l’État, via un comité de liaison qui mandate l’agence pour la définition des programmes et actions nécessaires et auquel l’agence rend compte. En second lieu, avec l’ensemble des partenaires membres de cette agence, à travers un comité qui définit la stratégie et les orientations programmatiques. Et, enfin, un comité opérationnel assurera le bon fonctionnement de l’agence. Ce dernier comité devrait se composer d’un porteur pour chacune des sept missions, issu de l’un des partenaires concernés et souhaitant s’investir. Cette dimension collégiale permettra, à mon sens, à la fois de répondre aux commandes de l’État, de se saisir des questions et propositions des partenaires en garantissant leur représentativité, autour du CNRS.

Enfin, sous six mois, l’agence devra définir et proposer à l’État une à trois thématiques de recherche innovantes et ambitieuses basées sur des questions scientifiques prioritaires.

Vous évoquez souvent les partenaires de l’agence. Quels sont-ils ? et quelle place tiendra l’agence au sein du paysage scientifique français ?

EC : Des partenaires, il y en a déjà 31 (voir encadré ci-dessous) et d’autres vont peut-être nous rejoindre ! Nous avons sollicité l’ensemble des membres d’AllEnvi, fondateurs comme associés, qui regroupe de fait les organismes nationaux de recherche et les associations d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Parmi les membres d’AllEnvi, l’Ifremer, dont les missions portent sur l’étude de l’océan, est évidemment très présent comme acteur majeur dans les problématiques de changement climatique et de biodiversité marine. Nous y avons par la suite ajouté plusieurs organismes ou agences dont les missions s’inscrivent dans les objectifs de l’agence : l’Ined, l’Inserm, l’OFB et l’Ademe. Par-delà le monde scientifique, nous avons inclus une dimension industrielle via l’ANRT, les collectivités territoriales à travers l’association Régions de France et l’Association des villes universitaires de France et enfin les associations citoyennes via la fédération d’associations France Nature Environnement.

Nous avons adopté cette organisation collégiale de manière à fédérer nos partenaires autour de l’agence et la construire ensemble. Celle-ci se saisira de sujets qui ne sont pas les missions habituelles des organismes et valorisera les échanges entre eux de manière à transcender les frontières actuelles entre ces établissements. L’agence agira essentiellement en « maîtrise d’ouvrage », la « maîtrise d’œuvre » de chaque action étant confiée à un ou plusieurs membres de l’agence.

Et, bien entendu, l’agence « Climat, biodiversité, sociétés durables » échangera régulièrement avec les autres agences de programmes, en particulier avec celle confiée à l’Inrae. Elle permettra d’aborder ensemble des enjeux de recherche qui dépassent les missions d’un seul organisme pour faire, ensemble, ce qui ne peut pas être fait seul ou en bilatéral.

  • 1Directrice de recherche CNRS au sein du Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (CNRS / CEA / Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines).
  • 2Outre Climat, biodiversité, sociétés durables, « Énergie décarbonée » et « Du composant aux systèmes et infrastructures numériques » confiées au CEA, « Spatial » au CNES, « Alimentation, agriculture, forêts et ressources naturelles associées » à l’Inrae, « Numérique, logiciels et algorithmes » à l’Inria et « Santé » à l’Inserm.
  • 3Créées à partir de 2009 dans le cadre du lancement de la Stratégie nationale pour la recherche et l'innovation, les cinq alliances thématiques de recherche sont des groupes de concertation chargés de réunir les principales institutions de la recherche publique dans le but principal de coordonner, dans certains secteurs identifiés, les priorités de la recherche et du développement en lien avec les organes du ministère chargé de la Recherche.

« Vu son large spectre de disciplines, le CNRS est porteur naturel de cette agence »

Antoine Petit : « Le CNRS, premier producteur de science sur les enjeux couverts par l’agence “Climat, biodiversité et sociétés durables”, s’est vu confier sa coordination. Le CNRS est, de plus, pilote ou co-pilote scientifique d’une quinzaine de PEPR qui sont thématiquement dans le champ direct ou indirect de cette agence. Nous opérons également la grande majorité des infrastructures de recherche de ce champ et nous saurons accompagner les partenaires dans la montée en puissance de ces outils collectifs.

Notre responsabilité principale sera de faire fonctionner cette agence de manière collégiale, avec l’objectif de créer des synergies entre les nombreux acteurs académiques et de faire ainsi en sorte que la science, et la recherche, puisse être mise au service des acteurs étatiques, des industriels, des collectivités territoriales ou encore des ONG, en développant des partenariats entre les uns et les autres ».

Les 31 partenaires de l’agence Climat, biodiversité, sociétés durables

  • Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe)
  • Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra)
  • Association nationale de la recherche et de la technologie (ANRT)
  • Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)
  • Association des villes universitaires de France (Avuf)
  • Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM)
  • Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs (CGE)
  • Commissariat à l’énergie atomique (CEA)
  • Centre d'études et d'expertise sur les risques, la mobilité et l'aménagement (Cerema)
  • Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad)
  • Conférence des grandes écoles (CGE)
  • Centre national d'études spatiales (CNES)
  • Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
  • France Universités
  • France Nature Environnement (FNE)
  • Institut français du pétrole – énergies nouvelles (Ifpen)
  • Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer)
  • Institut géographique national (IGN)
  • Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris)
  • Institut national d'études démographiques (Ined)
  • Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm)
  • Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae)
  • Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria)
  • Institut de recherche pour le développement (IRD)
  • Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)
  • Laboratoire national de métrologie et d'essais (LNE)
  • Météo France
  • Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
  • Office français de la biodiversité (OFB)
  • Régions de France
  • Service hydrographique et océanographique de la Marine (Shom)