Emeraude contribue aux moteurs du futur et à la décarbonation de l’aviation

Innovation

Le 6 septembre 2023, la Chaire « Emeraude » a été inaugurée à L’École Nationale Supérieure de Mécanique et d’Aérotechnique ISAE-ENSMA. Cette chaire industrielle de recherche Safran-Pprime est dédiée à l’étude des superalliages à base de nickel pour aubes de turbine. Retour sur une collaboration inédite entre Safran, le CNRS et l’Institut Pprime basé à Poitiers.

Emeraude, c’est son nom. Pour sytEmes MatERiaux pour AUbes De turbinEs. Cette chaire de recherche industrielle Safran-Pprime est inédite en de nombreux points.

Première spécificité, la chaire est portée à 100 % par Safran.
Les parties prenantes sont l'Institut Pprime et ses trois tutelles (CNRS, Université de Poitiers, ISAE-ENSMA), Safran Tech, Safran Aircraft Engines et Safran Helicopter Engines

Inauguration de la chaire Safran-Pprime « Emeraude » à l’ISAE-ENSMA (Poitiers), le 6 septembre 2023, en présence de représentants de Safran Tech, de Safran Aircraft Engines, de Safran Helicopter Engines, du CNRS, de l’ISAE-ENSMA, de l’Institut Pprime et de la Vice-Présidence de l’Université de Poitiers

Deuxième spécificité, la densité et l’ambition du programme de la chaire Emeraude.
Elle est dédiée à l’étude des superalliages base nickel pour aubes de turbine. Explications.

Les pièces du corps chaud d’un moteur d’avion - chambres de combustion, compresseurs et turbines - sont les plus exposées aux dégradations mécanique et environnementale. Les aubes de turbines des étages les plus chauds sont des petites pièces soumises à des fortes températures et pression, tout en tournant à des vitesses très élevées. L’un des enjeux de la fabrication et du développement de ces pièces est de conserver leur alliage solide, même en contexte de très hautes températures. C’est précisément l’objet de la chaire. « Il s’agit d’ajuster la chimie de fabrication de ces alliages afin de trouver le meilleur compromis de résistance mécanique à très haute température et de résistance à l’oxydation et à la corrosion», explique Jonathan Cormier, Maitre de conférences à l’ISAE-ENSMA, Ingénieur ENSMA, l’un des co-porteurs de la chaire.

Concrètement, pour fabriquer ces alliages à base de nickel, et donc les pièces des moteurs du futur, les industriels utilisent « le procédé de fonderie cire perdue, un procédé multimillénaire mais toujours d’actualité et en perpétuel développement. En France, une cinquantaine de personnes issues de différentes disciplines spécifiques à chaque étape du procédé, travaillent à la fabrication de ces pièces », expose Vincent Maguin, ingénieur de Recherche à la plateforme d’aubes de turbines avancées (PFX) de Safran Tech, le second co-porteur de la chaire.

La chaire porte spécifiquement sur l’étude de la métallurgie et des propriétés mécaniques de ces alliages : les propriétés mécaniques et procédés de fabrication ; le comportement des matériaux et leur endommagement ; le volet réparation de ces pièces à haute valeur ajoutée. « Il importe d’augmenter le potentiel des aubes de turbine afin de réduire le coût de fabrication et l’impact environnemental. Les chercheurs travaillent ainsi à la mise au point de procédés pour redonner une seconde vie à une aube légèrement érodée via ajout de matière localisé et/ou un réusinage », précise Vincent Maguin.

Troisième spécificité, l’impact sociétal de cette chaire.
En effet, la chaire Emeraude compte contribuer de manière déterminante à la décarbonation de l’aviation. D’une part, le juste emploi des matériaux permet de réduire sensiblement la consommation de carburant et la pollution des moteurs d’avion. En effet, plus la température en sortie de chambre de combustion est élevée, moins le moteur consomme.

D’autre part, le procédé et les modèles de prévisions de la durée de vie mis au point par les scientifiques améliorent la fiabilité des aubes de turbines, donc des moteurs d’avion permettant d’éviter des problèmes techniques susceptibles d’entraîner des retards d’avions, toujours préjudiciables aux passagers et aux compagnies

Microstructure optimisée de l’alliage monogranulaire TROPEA co-développé par l’Institut Pprime et Safran

Quatrième spécificité, l’enjeu de souveraineté nationale adressé par cette chaire.
Aujourd’hui, seuls sept à huit pays dans le monde, dont la France, sont en capacité de développer un corps chaud de moteur d’avion. En ce sens, il importe que la France développe sa filière de fabrication et caractérisation d’aubes de turbines en alliage monogranulaire.

La chaire Emeraude conforte Pprime dans sa place de leader académique sur la thématique des Matériaux Haute Température. En effet, depuis plus de 20 ans, de nombreuses thèses et études ont été menées et publiées sur le périmètre superalliage pour aube de turbine, dans le cadre du Laboratoire Pprime. Parmi les réalisations marquantes qui ont contribué à la renommée mondiale du Laboratoire, les chercheurs ont développé un banc unique au monde (banc MAATRE) pour tester les matériaux dans un environnement simulé de moteur d’avion ou d’hélicoptère. Seuls la NASA et l’Université d’Osaka peuvent rivaliser avec cette technologie. Une autre avancée majeure concerne la prévision de l’allongement et de la durée de vie des aubages via des modèles spécifiques qui peuvent aussi servir à l’analyse des composants lors d’expertises post-service des pièces.

En plus de répondre avec agilité aux besoins de l’industriel Safran, la chaire Émeraude contribue à l’attractivité de la formation à l’ISAE-ENSMA auprès des futurs ingénieurs. Huit thèses de doctorat sont programmées dans les cinq ans. La première a déjà débuté.

Au total, une équipe pluridisciplinaire de près de quarante scientifiques - 15 au sein du Laboratoire Pprime et 20 issus du Groupe Safran, place la France et Safran à la pointe des nouveaux développements des turboréacteurs et turbomoteurs pour avions et hélicoptères civils et militaires et joue un rôle significatif dans la réduction de l’empreinte carbone de l’aviation.